Mauritanie : incarcération d’un journaliste et silence des organisations; La liberté de la presse en question
La Cour d’appel de Nouakchott a ordonné l’incarcération du journaliste Mohamedi Ould Trad, alias « Mohamedi Al-Shinqiti », suite à une plainte de l’ambassadeur mauritanien en Syrie, Lamana Ould Al-Mujtaba, proche du président de la République. Cette décision, liée à la diffusion d’une interview sur la plateforme Ajil (dirigée par Al-Shinqiti) où un citoyen saoudien accusait l’ambassadeur de corruption, relance un débat brûlant sur les entraves à la liberté de la presse. Le journaliste est poursuivi pour « diffamation » et « violation de la vie privée », bien que les propos incriminés aient été tenus par un invité, et non par lui-même.
Il faut bien préciser que est emprisonnement mais en cause le classement de la Mauritanie en 2023 par RSF qui avait surpris toute la corporation en Mauritanie du fait que aux yeux des cette corporation toute tendance confondu , il y a un véritable recul depuis ‘avènement du pouvoir actuel avec des actes reflétant une dégradation inquiétante, marquée par des lois répressives, des arrestations ciblées et une judiciarisation croissante du travail journalistique.
Le silence des organisations : une ombre sur l’indépendance de la profession.
Si l’affaire Al-Shinqiti a suscité des réactions sporadiques au niveau de certains mouvements de défense de droits de l’homme, comme le mouvements Kafana, le mutisme des syndicats et organisations locales de journalistes interroge. Aucune déclaration publique n’a été émise par les structures censées défendre la profession, alimentant les suspicions d’une mainmise du pouvoir sur ces institutions. Pour de nombreux observateurs locaux, ce silence confirme que la majorité des organisations de défense des médias et des droits des journalistes sont « sous influence », évitant soigneusement de critiquer l’exécutif ou ses proches.
Un paysage médiatique recomposé par le pouvoir
Cette affaire illustre une recomposition du paysage médiatique mauritanien, calquée sur les intérêts du pouvoir. Les médias indépendants, comme ‘Ajil’, et Points Chauds sont criminalisés ou marginalisés, tandis que les plateformes pro-gouvernementales bénéficient d’une impunité quasi totale. Cette stratégie de contrôle, combinée à des procès intimidants, réduit progressivement l’espace d’expression libre. « Les autorités instrumentalisent la justice pour faire taire les voix critiques, et les organisations professionnelles, au lieu de résister, se taisent par complicité ou par peur », dénonce un journaliste mauritanien membre du bureau du syndicat des Journalistes Mauritaniens, couvert d’anonymat.
Une affaire révélatrice d’un système
Le cas d’Al-Shinqiti n’est pas isolé. Depuis 2 ans, cette affaire oppose le citoyen saoudien à Ould Al-Mujtaba, avec des rebondissements judiciaires opaques. La Haute Cour a finalement tranché en faveur de l’ambassadeur, invalidant deux jugements précédents favorables au Saoudien. Pourtant, relayer ces allégations, même dans un cadre journalistique équilibré, est désormais passible de prison. Ce précédent dangereux confirme que les autorités utilisent des lois floues sur la diffamation pour étouffer toute enquête gênante, surtout lorsque des figures du régime sont concernées.
Un appel à la solidarité et à la réforme
L’emprisonnement d’Al-Shinqiti et le silence des organisations locales soulignent l’urgence d’une réorganisation de ma corporation, pour protéger les journalistes des poursuites abusives et face à la stratégie du pouvoir actuelIls visant à mettre toute la presse à sa solde et éliminer celle qui résiste. Révèlent aussi la nécessité d’une solidarité transnationale, face à un pouvoir déterminé à contrôler le récit médiatique. Sans pression internationale et sans mobilisation interne, la Mauritanie risque de sombrer davantage dans l’autoritarisme, où la presse libre n’existera plus que dans les marges.