Les autorités judiciaires mauritaniennes ont ordonné l’incarcération de la journaliste et militante Maimouna Mint Slimane, alias Warda Ahmed, membre influente du mouvement anti-esclavagiste IRA (Initiative pour la Résurgence du mouvement Abolitionniste). Cette décision, intervenue mardi, fait suite à son refus de se plier à un contrôle judiciaire imposé par un juge d’instruction, dans le cadre d’une plainte déposée par l’homme d’affaires Khatri Ould Djeh.
Selon des sources judiciaires, l’unité de cybercriminalité de la Gendarmerie nationale a déféré Warda Ahmed au procureur de la République lundi. Bien que le parquet ait initialement requis son emprisonnement, le juge avait opté pour un placement sous contrôle judiciaire, assorti d’obligations strictes : connexion quotidienne aux autorités et interdiction d’utiliser les réseaux sociaux durant l’enquête. La militante a rejeté ces conditions, qualifiées de « muselière numérique » par ses soutiens, conduisant à son incarcération.
Une affaire qui cristallise les tensions
Dans un communiqué virulent publié mardi, l’IRA a dénoncé une « détention arbitraire » visant à réduire au silence une voix critique. Le mouvement affirme que Warda Ahmed, responsable médias du comité de l’organisation, a été ciblée pour avoir refusé de « taire les insultes contre l’IRA et ses membres ». Il souligne que son interrogatoire s’est déroulé en l’absence du plaignant, une procédure jugée « irrégulière » et symptomatique d’une « stratégie d’intimidation » contre les défenseurs des droits humains.
L’IRA exige sa libération immédiate et dénonce l’instrumentalisation du système judiciaire pour « réprimer des opinions pacifiques ». « Cette arrestation montre comment la justice est détournée pour servir des intérêts privés et politiques », accuse le communiqué, rappelant son engagement pour la liberté d’expression face à un « climat de peur croissant ».
Si les autorités justifient la mesure par le non-respect des obligations judiciaires, les observateurs internationaux s’inquiètent d’une escalade répressive contre les militants. La Mauritanie, régulièrement épinglée pour ses restrictions aux libertés publiques, avait déjà attiré les critiques en 2023 après l’embargo imposé sur plusieurs médias indépendants qui refusent de faire les éloges du système.
La détention de Warda Ahmed relance le débat sur l’équilibre entre sécurité nationale et droits fondamentaux. Alors que l’enquête se poursuit, la pression monte sur Nouakchott : des ONG appellent à un réexamen urgent du dossier, tandis que des hashtags comme #FreeWarda gagnent les réseaux sociaux. L’affaire pourrait devenir un test décisif pour le gouvernement, entre tensions internes et regards internationaux.
À suivre.