Niamey, capitale du Niger, a été le théâtre d’une déclaration historique. Les ministres des Affaires étrangères de l’Alliance des États du Sahel (AES), qui réunit le Mali, le Niger et le Burkina Faso, ont réaffirmé leur décision sans appel : tourner le dos à la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Ce retrait acte une rupture radicale et reflète une volonté de rebâtir une coopération régionale en accord avec les aspirations populaires.
Une décision lourde de sens
Pour les observateurs, ce choix symbolise un rejet clair de la CEDEAO, accusée de ne plus être à la hauteur des attentes des peuples de la région. L’organisation est critiquée pour son inefficacité face aux défis de la zone, notamment l’insécurité chronique qui gangrène le Sahel. Les trois pays dénoncent une institution devenue, selon eux, un relais des intérêts étrangers, incapable de proposer des solutions réalistes pour faire face aux crises multiples
Les raisons d’une rupture
Ce retrait résulte d’un profond sentiment de marginalisation et d’abandon. Les dirigeants militaires du Mali, du Niger et du Burkina Faso reprochent à la CEDEAO de sanctionner leurs choix souverains, notamment en matière de sécurité, tout en fermant les yeux sur les véritables urgences régionales. Les sanctions économiques et politiques imposées aux trois États n’ont fait qu’accentuer leur isolement et fragiliser leurs économies, affectant directement leurs populations.
Les trois pays reprochent également à la CEDEAO son incapacité à les soutenir face au terrorisme, qui demeure la principale menace pesant sur le Sahel. Loin d’apporter des solutions concrètes, l’organisation aurait été un frein à leur quête d’indépendance politique et sécuritaire.
Vers une nouvelle dynamique
Ce retrait pourrait révolutionner l’ordre régional en Afrique de l’Ouest. Les pays de l’AES ambitionnent de bâtir une structure plus adaptée aux besoins réels de leurs populations. Parmi les projets en cours figure la création de nouveaux mécanismes favorisant la libre circulation des biens et des personnes entre les membres de l’Alliance. Cette approche, selon les dirigeants, reflète une détermination à développer un cadre de coopération régionale libéré des ingérences extérieures.
« L’intégration régionale, réalisée sur la base des besoins et des réalités locales, est la seule voie pour garantir la souveraineté de nos peuples », a déclaré un représentant du Burkina Faso lors de la réunion.
Réactions et appels au dialogue
La décision de l’AES a suscité de vives réactions. Le président du Sénégal, qui a tenté de jouer les médiateurs, appelle à reconsidérer ce retrait. Il plaide pour une solution qui réconcilierait les aspirations des pays sahéliens avec l’unité de la CEDEAO. Par ailleurs, des appels au dialogue ont été lancés par le bureau parlementaire de la CEDEAO, qui demande un délai supplémentaire pour trouver un compromis et éviter l’escalade
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Un avenir incertain
Le retrait de l’AES pose de nombreux défis. S’il marque une affirmation de souveraineté, il expose également les trois pays à un risque d’isolement diplomatique et économique. Construire une nouvelle architecture régionale nécessitera des ressources importantes, une volonté politique forte et des alliances stratégiques avec d’autres partenaires africains ou internationaux.
D’autre part, les pressions extérieures ne manqueront pas. Les puissances occidentales, qui ont historiquement joué un rôle central dans la région, pourraient chercher à contrer cette dynamique, notamment par des mesures coercitives.
Une ambition à concrétiser
Le retrait de l’AES de la CEDEAO signe un tournant majeur pour l’Afrique de l’Ouest. Il traduit l’émergence d’une ambition commune pour un avenir fondé sur la souveraineté et la coopération entre États partageant les mêmes réalités. Cependant, la réussite de cette initiative repose sur la capacité des pays sahéliens à relever les défis politiques, économiques et sécuritaires qui se dressent sur leur chemin.
Loin d’être un simple acte de défiance, ce retrait incarne une réflexion plus large sur la façon dont les pays africains peuvent réinventer leurs relations régionales pour mieux servir leurs populations.
Ould ELay
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