La Mauritanie est secouée par une affaire aux relents de bataille judiciaire et politique. L’humoriste Beybat Akhoy a officiellement porté plainte contre Mohameden Ould Ishedou, avocat vedette et pilier de la défense de l’ex-président Mohamed Ould Abdel Aziz. Motif : « insulte et diffamation » après que le juriste a comparé le paysage politique national à un « commerce de quartier », évoquant lors d’une conférence de presse le passage de « plusieurs présidents » et même de Bebat Akhoy dans cette « échoppe ». Des propos perçus par l’artiste comme une atteinte à son intégrité professionnelle.
Mais au-delà des accusations, c’est la rapidité inédite du traitement de cette plainte qui suscite un tollé sur les réseaux sociaux. Alors que des milliers de dossiers dorment dans les tiroirs du palais de justice, souvent classés sans suite, la convocation express d’Ould Ishedou par la police judiciaire du Tribunal Ouest de Nouakchott interroge. « Pourquoi cette priorité soudaine ? », s’indignent des internautes, soupçonnant des motivations cachées derrière la démarche du comédien. Certains y voient une manœuvre pour museler un avocat trop impliquédans la défensede son client, d’autres une instrumentalisation de la justice à des fins de règlement de comptes.
« Comment expliquer qu’une simple plainte en soit traitée en un claquement de doigts, quand des victimes de crimes graves attendent depuis des années ? », dénonce le président de mouvement Kefana sur Facebook. Une rhétorique qui alimente les théories : et si cette plainte visait moins à défendre l’honneur de Beybat qu’à envoyer un message politique à Ould Ishedou, connu pour ses prises de position et ces déclarations dans le dossier de son client, à savoir l’ex président Mohamed Ould Abdel Aziz mais avec des déclarations modérées mais des signes forts contre le pouvoir actuel ?
Du côté juridique, l’affaire pourrait cristalliser les tensions entre liberté d’expression et protection de la réputation. Mais dans l’opinion publique, elle révèle une défiance grandissante envers une justice perçue comme à deux vitesses. Entre les « têtes d’affiche » et les anonymes condamnés à l’oubli, le cas Beybat-Ishedou risque de laisser des traces bien après la fin des procédures que du procès.