Mauritanie/Biram Dah Abeid : un leader fabriqué par la lutte, mais autonome par conviction

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Biram Dah Abeid : un leader fabriqué par la lutte, mais autonome par conviction.

Dans le paysage politique mauritanien, Biram Dah Abeid détonne. Ni militaire, ni homme d’appareil, il s’est imposé comme l’incarnation de la lutte contre l’esclavage et l’injustice sociale. Pourtant, son ascension ne relève pas du hasard : elle répond à une configuration socio-politique particulière qui a favorisé l’émergence d’un tel profil. Il est l’exemple d’un leader fabriqué par la souffrance collective, mais devenu gênant pour le système en raison de son autonomie et de son discours progressiste

Une réponse à un vide : le porte-voix des exclus

Dans une Mauritanie marquée par des hiérarchies ethniques et tribales rigides, la voix des Haratines, descendants d’esclaves , a longtemps été marginalisée. Le système politique post-indépendance, dominé par des élites arabo-berbères, a peu à peu invisibilisé cette majorité silencieuse.
Biram est apparu comme le porte-voix d’une souffrance tues, d’un peuple sans représentation. En cela, il a été « fabriqué » par une oppression systémique, qui appelait un visage, un cri, un corps debout pour porter la rupture. Ce n’est pas un parti qui l’a produit, mais la lutte elle-même : celle contre l’esclavage foncier, celle pour la dignité des Haratines, celle pour une citoyenneté réelle.

Une fabrication hors système

Contrairement à d’autres figures promues depuis l’intérieur (comme Ghazouani dans l’armée ou Ahmed Dadah dans les sphères administratives), Biram est un leader « exogène » au système. Il n’a pas été choisi, il s’est imposé. Et cela a contribué à renforcer sa légitimité populaire : il n’est pas vu comme un produit des arrangements politiques, mais comme l’ennemi naturel du système d’oppression.

Ses multiples arrestations, ses passages en prison, ses discours incendiaires contre l’État « raciste » ont fini par renforcer son image de martyr debout, voire de prophète pour une partie de ses soutiens. Cela aussi fait partie de la stratégie de fabrication : la répression le rend plus légitime.

La tentative de récupération et ses limites

Le pouvoir a parfois tenté de neutraliser Biram par le dialogue, en lui offrant un siège à l’Assemblée nationale, en le laissant se présenter à la présidentielle, ou en l’invitant à des rencontres diplomatiques. Mais son refus de compromis et sa parole libre en font un leader difficile à intégrer dans les calculs habituels.
Cette tension entre inclusion et marginalisation est typique des leaders autonomes : on les fabrique par le rejet, mais ils deviennent ingérables quand ils échappent au contrôle.
Un leader à la croisée des chemins

Aujourd’hui, Biram est à un tournant. Doit-il se professionnaliser politiquement, s’allier à d’autres forces, ou garder une posture de radicalité morale ? Le danger est double : s’institutionnaliser et perdre son aura, ou rester en marge et ne jamais accéder au pouvoir. Mais cette ambivalence est aussi ce qui le distingue : il ne veut pas seulement le pouvoir, il veut le bouleverser.
Biram Dah Abeid n’est pas un leader façonné par une stratégie partisane, mais par une réalité sociale explosive. Il est la preuve que certains leaders ne sont pas produits « par le haut », mais émergent des entrailles de l’oppression. Cette légitimité populaire est sa force, mais aussi son défi : comment transformer une figure de lutte en figure de pouvoir, sans se renier ?

Daouda Dia Moussa

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