Le français : Quel projet de reconquête ?
A la Une, Actualites, Edito 01 Déc 2022Faute de subventions, le français perd du terrain dans l’espace francophone d’antan
Ce constat, attesté par les faits sur le terrain de la réalité, a été même reconnu publiquement par le président français Emmanuel Macron, à l’occasion du XVIIIe Sommet de la Francophonie, qui s’est tenu à Djerba, en Tunisie.
«C’est une réalité : dans les pays du Maghreb, on parle moins français qu’il y a 20 ou 30 ans», dit Macron, selon lequel, ce recul de la langue de Molière par une combinaison de facteurs.
Toutefois, Macron s’est trompé en perdant vue les véritables raisons de ce déclin spectaculaire du français et se contentant de le justifier par des facteurs géostratégiques tels que la montée manifeste du sentiment anti-français dans certains Etats du Sahel dont le Mali et le Burkina Faso ainsi que dans certains Etats de la CEDEAO ou du Maghreb où l’entrée attendue de ces pays dans le cercle restreint des producteurs du pétrole et du gaz, s’accompagne parallèlement d’une affluence sur l’anglais, cette langue à usage courant dans la plupart des multinationales.
Ce que le Président français reconnait d’ailleurs, lorsque souligne, en faisant référence à l’essor de l’anglais, qu’il a qualifié de «nouvel espéranto», qui a donc profité de sa facilité d’apprentissage et de son rôle prépondérant dans la communication universelle, mais aussi de facteurs politiques.
Mais, d’autres facteurs non moins importants et internes aux Etats mêmes et relevant de la politique francophone extérieure expliquent à bien des égards cette autre forme de « décolonisation » de la langue française par rapport à l’arabe et l’anglais mais aussi les langues nationales.
La meilleure illustration de cet état de fait, est le Sénégal, où présent dans le pays de la Teranga depuis près de quatre siècles (la première ville française fondée en Afrique est Saint-Louis, en 1659, à l’embouchure du fleuve.) et ayant participé à l’unification des communautés, la langue de Molière s’est complétement effacée devant les langues nationales, devenues à la mode, quoiqu’on entend parfois dans les discussions et même au parlement, des mots rares de français, dévoilant l’image d’une langue agonisante.
Il y a aussi la presse francophone, principale vecteur du français, peine, en raison du manque de subventions et de ses faibles capacités à attirer l’attention des lecteurs plutôt portés sur l’audiovisuel, où les langues communautaires, constitutionnellement soutenues par les masses et par les gouvernements gagnent du terrain et deviennent monnaie courante.
En effet, jouissant dans le passé de subventions considérables mobilisées, à travers les ambassades françaises accréditées dans ces Etats et les centres culturels qui y sont implantés, la langue de Molière a lourdement souffert du recul voire de la disparition d’investissements orientés vers son enseignement intensif et surtout assoupli, autrement dit, le français non académique, efficace pour les affaires et la communication.
Un tournant qui a été favorisé aussi par l’arrivée dans le pays de multinationales opérant dans les prospections du pétrole et du gaz et dont la langue d’usage est principalement l’anglais.
Des sociétés dotées d’une capacité de recrutement énorme et qui exigent aussi la maitrise de l’anglais pour y travailler face à des sociétés françaises quasi-inexistantes hormis Total.
Dans sa volonté d’inverser cette donne, le chef d’État français met en exergue aussi ce qu’il a appelé, la nécessité pour les défenseurs de la francophonie d’»avoir un projet de reconquête», particulièrement par la création culturelle et artistique en langue française, pour, ainsi, renforcer l’attractivité de cette langue.
Alors que
Mais, cette ambition restera une illusion tant que les moyens mobilisés par les Champs Elysée et son bras représenté par les ministères des affaires étrangères et de la Francophonie, ne seront pas en mesure de susciter un intérêt réel et attractif des Etats en Afrique de l’Ouest, du Nord et dans le Maghreb arabe, qui ont tourné progressivement le dos à cette langue, notamment dans leur système d’enseignement et professionnel.
Le mieux pour la France pour cette reconquête est de faire les Etats généraux de la langue française qui réunit tous les intervenants afin de dégager une stratégie permettant au français de rebondir et de rétablir sa notoriété d’antan.
MOULAYE NAJIM MOULAYE ZEINE
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