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logo-can-2015Le 10 octobre dernier, le Maroc annonçait avoir demandé le report de la CAN 2015, prévue du 17 janvier au 8 février prochain, par mesure de précaution face au risque Ebola. Le lendemain, la Confédération africaine de football réagissait et excluait tout changement du calendrier. Depuis, il ne se passe pas un jour sans que des rumeurs plus ou moins fantaisistes ne fleurissent sur les réseaux sociaux voire dans les médias. Loin de ce tintamarre, que retenir, près de deux semaines après le coup de tonnerre provoqué par l’annonce marocaine ? Eléments de réponse.

 Dès l’annonce marocaine de demande de report de la CAN 2015, médias et réseaux sociaux virent les pseudo-fuites se multiplier : à en croire celles-ci, ce n’était qu’une question de jours, le Royaume allait renoncer définitivement à l’organisation de cette édition de la Coupe d’Afrique. Accréditée par l’existence de discussions entre la CAF et d’éventuels pays organisateurs de remplacement, cette rumeur a pris de la consistance, jusqu’à ce que le gouvernement marocain, par le biais d’un communiqué du ministère de la Jeunesse et des Sports, ne lui torde enfin le cou.

Le Maroc n’a pas renoncé à la CAN 2015

« Le Maroc exprime toujours la ferme volonté d’accueillir la prochaine édition de la Coupe d’Afrique des Nations. Le Maroc a demandé le report de la manifestation, prévue initialement en janvier 2015, pour une raison claire et précise : l’évolution rapide et inquiétante du virus Ebola », indique le document officiel, rappelant que le pays se base sur les chiffres de l’OMS. « Le Maroc propose des alternatives et se prépare activement à la réunion prévue dans les prochains jours avec les instances responsables de la Confédération africaine de football (les 2 et 3 novembre, ndlr) » Voilà qui a calmé provisoirement les imaginations à propos du choix du Maroc, mais il existe d’autres sujets de spéculations.

L’Afrique du Sud dit « non et non »

Présentée comme le plus crédible des « plans B » en cas de refus persistant du Maroc, l’Afrique du Sud ne sera sans doute pas celui-là. Après avoir « dépanné » la CAF en 2013 en palliant la défection de la Libye, la nation arc-en-ciel, qui a aussi accueilli en début d’année le Championnat d’Afrique des Nations (CHAN, la CAN réservée aux joueurs locaux), ne souhaite pas jouer indéfiniment les pompiers de service. « La question de savoir si l’Afrique du Sud est le plan B ne fait pas sens à ce stade, car le Maroc ne s’est pas retiré, et demeure à ce jour l’hôte officiel de la CAN 2015. Il n’est donc pas juste de parler de l’Afrique du Sud comme d’un plan B », a d’abord déclaré Dany Jordaan, le président de la Fédération sud-africaine (SAFA).

D’un tweet, le ministre des Sports a enfoncé le clou, balayant toute possibilité d’accueillir l’épreuve. « Accueillir la CAN, c’est non et non », a juré Fikile Mbalula. « Nous n’avons pas à notre disposition, actuellement, les ressources pour prendre le relais. Nous l’avons fait par solidarité avec la Libye l’an dernier, et notre budget ne nous permettra pas d’accueillir la nouvelle édition de la CAN. C’est absolument impossible », précisait ensuite le représentant du gouvernement, avant de conclure : « L’Afrique du Sud n’est pas le grand frère de l’Afrique, en conséquence nous n’accueillerons pas la CAN année après année. »

Le Ghana et le Nigeria ne seraient pas contre

Exit donc, l’Afrique du Sud. Mais d’autres pays seraient prêts à remplacer le Maroc au pied levé. Passons sur les hypothèses fantaisistes, plaçant la CAN 2015 au Soudan, en Algérie ou au Gabon. Deux pays sont réellement sur les rangs. Le Ghana tout d’abord, que la CAF a sondé à ce sujet. C’est le ministre ghanéen des Sports, Mahama Ayariga, qui l’a lui-même révélé. « Le gouvernement ghanéen considère cette demande », a-t-il commenté sur sa page Facebook. Hôte de la Coupe d’Afrique des Nations en 2008 et candidat à l’organisation de l’édition 2017, le Ghana dispose déjà de quatre stades aux normes requises.

Le Nigeria ensuite : le jour même où l’Organisation mondiale de la Santé annonçait que le pays était débarrassé d’Ebola, le Nigeria s’est déclaré prêt à accueillir la CAN 2015. « Je pense que nous sommes intéressés [par l’organisation de la CAN]. La décision ne revient pas seulement à la NFF, mais on nous a demandé si nous pouvons accueillir la compétition et nous avons dit oui, pourquoi pas ?, indiquait Seyi Akinwunmi, vice-président de la Fédération nigériane de football. Je pense que la Commission Nationale des Sports et le gouvernement sont en train d’étudier la possibilité d’accueillir le tournoi. »

Platini s’en mêle

Pendant ce temps-là, les clubs européens suivent attentivement la situation. Depuis longtemps défavorables à la programmation de la Coupe d’Afrique en plein milieu de la saison européenne, les principaux employeurs des footballeurs africains tiennent peut-être là une occasion unique de se faire entendre. Ce n’est sans doute pas sans arrière-pensée que Michel Platini, le président de l’UEFA, s’est prononcé pour le report de l’édition 2015 à une date ultérieure. « Je pense que la santé des gens est prioritaire. Moi aussi je me pose la question de savoir si je dois aller dans les congrès de nos amis africains, c’est un vrai problème. Il faut contacter les instances mondiales de la santé pour obtenir davantage de renseignements concernant la propagation du virus Ebola et l’éventuel danger de l’organisation d’une compétition sportive », conseillait l’homme fort du football européen.

Une recommandation pas du tout, mais alors pas du tout, au goût de la CAF, qui ne tarde pas à le faire savoir à Michel Platini, en lui renvoyant la crise ukrainienne à la figure. « Au nom du principe de non-ingérence qu’elle s’astreint à respecter, la CAF s’est gardée jusqu’ici de se prononcer sur tout acte de gestion du football européen ou de tout autre continent. Malgré les risques inhérents au conflit armé qui sévit en Ukraine, pays où un avion civil a été abattu faisant près de 300 morts, l’UEFA n’a pas jugé nécessaire d’exclure de ses compétitions les clubs ukrainiens ou de faire disputer les matchs dans un périmètre de sécurité en dehors de cette nation, au nom du principe de prudence, perfidement évoqué dès lors qu’on parle de l’Afrique. La CAF tient par la présente à réaffirmer qu’elle attache du prix au respect de sa souveraineté et n’entend laisser qui que ce soit interférer dans la gestion de ses affaires. »

S’estimant offensé, Michel Platini a depuis demandé des excuses à la Confédération africaine, dont on guettera avec intérêt le prochain communiqué. Nous ne sommes pas au bout de nos surprises dans ce feuilleton : la CAF n’a-t-elle pas annoncé que, dans le cas où la défection marocaine se confirme, elle se réservait le droit de tirer le pays organisateur au sort.