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 mauri-UEEst-ce le début d’une crise politique entre le Gouvernement mauritanien et l’Union Européenne ? La question mérite d’être posée au regard de l’intervention personnelle du président Aziz en réaction à la condamnation dont a écopé son régime en relation avec le maintien en prison de Biram Ould Dah Ould Abeidi, président de l’Ong anti-esclavagiste Ira.

Un mélange de genre du gouvernement mauritanien ou un alibi dont use l’Union Européenne pour faire pression sur la Mauritanie pour le renouvellement de l’accord de pêche ?

Ce qui est sûr c’est que le président Mohamed Abdelaziz semble outré par les européens qui lui ont promis de l’argent, 25 millions d’euros dans la lutte contre le terrorisme, et qu’il n’aurait pas reçu « à  ce jour aucun euro » pour reprendre son expression.

Côté pouvoir mauritanien, c’est donc le temps des suspicions avec l’Union Européenne. La condamnation par le Parlement de l’emprisonnement du président de l’Ira ne serait qu’un « alibi » pour faire pression sur le Gouvernement mauritanien pour l’amener à reconsidérer sa position quant à la contrepartie financière réclamée pour l’accès à la ressource. Soixante sept millions que l’Ue estime un peu cher pour que l’accord fini en queue de poisson le lundi 15 décembre 2014 soit rentable. Elle en proposerait 47. C’est d’ailleurs la seule objection sur toutes les mesures acceptées dans le dernier protocole 2012-2014 qui assurent à la Mauritanie une mauritanisation de 60% des équipages, la donation gratuite de 2% de la capture débarquée dans le pays et l’exclusivité du poulpe aux nationaux.

Mais tout n’est évidemment pas parti par-là. Ce climat délétère a été usé depuis quelques semaines par les défenseurs de Cheikh Ould Baya qui ne voulaient voir dans ses propres déclarations sur sa propre fortune qu’une autre tentative de l’Union Européenne via une « partie mauritanienne » tendant à le décrédibiliser.

Dans cette nouvelle partie où apparemment le président Aziz a décidé de descendre dans l’arène pour porter main forte à son ami, Cheikh Ould Baya, au risque de susciter une crise dans un verre d’eau, avec l’Union Européenne, la mayonnaise du mélange de genre est bien préparée.

La coïncidence de la condamnation par le Parlement Européen du maintien du président d’Ira en même temps que d’autres de ses disciples, à un moment où la Mauritanie abrite le processus de Nouakchott est présentée comme une tentative de l’Union Européenne à pousser la pression à son paroxysme contre le régime en place pour l’amener à signer des accords de pêche. La réponse cinglante du président Aziz qu’ « il n’y pas d’esclavage en Mauritanie » est quelque peu contrariée par les campagnes tous azimuts dans le pays présentant cette tare comme un crime. Des Imams ont même été invités à mener la guerre contre ces pratiques.

De son côté, même si la condamnation n’est pas contraignante, l’Union Européenne, l’un des principaux pourvoyeurs bilatéraux et multilatéraux du pays, semble jouer à des relations incestueuses avec le Pouvoir en place dont elle a besoin pour la lutte contre le terrorisme mais surtout contre l’immigration clandestine.  Une vanne que la Mauritanie a fermée grâce à la coopération opérationnelle avec l’Espagne notamment. Un dossier géré techniquement et financièrement par l’ex-colonel Baya. Encore lui!

Dans cette partie d’échec, l’ancien délégué Cheikh Ould Baya est apparemment un pion que le président Aziz utilise pour éviter un «échec et mat» dans ses négociations en sourdine avec l’Union Européenne. Car malgré les déclarations intempestives, les relations y compris l’accord de partenariat de pêche ne peuvent être rompues. Le pion trop en avant de ses lignes y laissera-t-il sa peau? Rien n’est moins sûr.

Si l’Ue a besoin des protéines mauritaniennes, le régime en place à Nouakchott a encore besoin d’euros pour faire face à la crise de vente des matières premières qui lui assuraient, avec la pêche, ses principales recettes.  Alors où se dirige-t-on avec ce nouvel épisode d’une relation qui commence à faire des vagues ?

A l’affût, les requins chinois, voraces et spécialistes des dessous de table, se frottent les mains en espérant qu’après l’investissement de 100 millions de dollars de polyhondone, sans respect des engagements pris, profiteraient d’un éventuel divorce entre Bruxelles et Nouakchott.

Un chant de sirène que le Pouvoir, dans son intérêt bien compris, devrait exorciser d’autant que Paris est entrée dans la danse exhortant le Pouvoir au respect des militants des droits de l’Homme.

Alors qui vraiment tente de noyer le poisson ?

En attendant le Gouvernement mauritanien peut mettre en place son budget 2015 sans compter sur cette contrepartie. Cette affaire, sans compter les soubresauts avec quelques pays voisins est la première crise d’envergure pour le Pouvoir de Aziz. Elle intervient pour lui la veille de la remise de témoin de la présidence de l’Ua. Une position qui va probablement le fragiliser davanatage.