S’il ne s’exprime plus depuis sa sortie incontrôlée, c’est qu’il craint qu’Aziz ne le fasse enfermer tout simplement car il sait qu’Aziz en est bien capable vu le sort qu’il a réservé à ses plus proches soutiens dès qu’il prit le pouvoir notamment un certain Bouamatou pour ne citer que lui. Que monsieur Ould Baya se rassure, les temps ont changé, Aziz s’en va…
Au-delà du fait que les militaires protègent le pays des boutiquiers comme on prend soin d’une boutique avec désormais une alternance de bail apaisée pour le fonds de commerce, Aziz s’en ira ne serait-ce que pour fermer le caquet à son cousin Ely en lui retirant le prestige d’unique militaire « président » ayant rendu le pouvoir au nom de l’alternance démocratique, de même que cette hausse des salaires promise de près de 50% répond à une litanie d’Ely assurant qu’il est seul à avoir augmenté de façon significative le salaire des fonctionnaires.
Ainsi, même si son dernier mandat sera peut-être marqué par un petit souci de ce qu’on dira après lui même si cela a toujours été son dernier souci, le premier étant qu’il ne soit pas poursuivi ensuite pour avoir du sang sur les mains car c’est l’essentiel vu que chez nous les affaires d’argent finissent toujours par être digérées, ainsi même si c’est son dernier mandat, Aziz n’ira jamais jusqu’à franchir la ligne jaune de son action politique, ligne derrière laquelle vit à l’abri sa véritable famille à savoir l’armée.
L’immunité militaire est un remarquable bouclier contre les slogans du chef de l’Etat. Depuis qu’il est au pouvoir, il n’a jamais touché ni inquiété le moindre militaire sinon un ou deux seconds couteaux dans l’affaire qui a emporté une ministre à une époque où il fallait donner des signaux forts de la lutte contre la gabegie. Lutte qui n’est pas fausse mais qui, comme toute règle, connaît ses exceptions… Cette immunité fait partie de la lucidité légendaire d’Aziz qui le faisant partir de plusieurs coups d’état, le fit général lui et ses potes au nez et à la barde des anciens pour finir par tenir le pays après une incroyable partie d’échec silencieuse dont on a vu que les derniers coups.
C’est son destin d’homme du 18, tel que je l’avais présenté alors qu’il n’avait pas encore déployé son génie de la manipulation. Peut-on lui en vouloir de savoir exactement ce qui peut le faire aller de l’avant et ce qui peut le faire éjecter ? Je l’ai toujours dit dès qu’il a pris le pouvoir alors que l’opposition voulait nous présenter Aziz comme un esprit léger : bien contraire, la suite l’a prouvé. S’il n’est pas un « littéraire » comme il désigne ceux qui ne peuvent pas faire carrière en répondant aux ordres, il n’en reste pas moins l’un des esprits calculateurs les plus puissants de la Mauritanie sinon il n’en serait pas là.
Voyez donc le parcours : un petit colonel inconnu au bataillon qui, grâce à madame alors chef du protocole de la première dame de Taya, finit par mettre les pieds au cœur de la présidence pour protéger celui qui fera ensuite la fortune de son destin. Premier coup d’Etat, Aziz sachant qu’il est trop inconnu, ne tenant pas assez l’armée et ne voulant pas affronter les opposants à Taya encore vifs et décidés, il envoie à leur rencontre l’homme qu’il fallait : le colonel Ely Ould Mohamed Vall qui fera un travail formidable consistant à réconcilier l’armée et les civils avec son bagout et son français de militaire instruit : ce fut la fameuse transition qui ne consistait ni plus ni moins qu’à donner à Aziz le temps d’élargir son ambition sur l’armée et le pays.
Après, génie de l’armée qui comprit que pour encore mieux apaiser les civils, autant leur faire élire démocratiquement un civil militairement choisi et makhzenement doté. Ce fut Sidioca. La suite s’est jouée à l’audace d’un homme qui ne pouvait pas laisser un civil, qu’il a fait président et qui l’a fait général, fût-il chef des armées, décapiter son pouvoir et ruiner son destin.
Le second coup d’Etat ne fut qu’un réflexe d’homme armé menacé par un civil. Ni plus ni moins. Personne n’a vu ce coup d’Etat arriver, pas même la France. Personne… Coup d’état déclenché par un coup de poker du marabout Sidioca, et ses fameux décrets en papier, croyant que de l’intérieur et de l’extérieur un coup d’état ne passerait jamais. C’est pourtant passé mais pas comme une lettre à la poste. Il a fallu jouer gros, naviguer à vue et tout concéder jusqu’à se faire accepter de l’extérieur et de l’intérieur.
Aziz quitte officiellement l’armée et le HCE donne aux civils tous les postes stratégiques dans le gouvernement. De Dakar les civils opposants trahissent Sidioca et courent dans le piège. Depuis qu’ils ont été vaincus démocratiquement, ils crient à la crise politique en oubliant qu’Aziz ne pouvait pas perdre car c’est le pouvoir qu’il tient qui fit élire Sidioca.
Ensuite il y eut tout le reste. Inutile de revenir dessus. Il faut pourtant se souvenir de la balle amie qui a prouvé que même à Paris entre la vie et la mort plusieurs mois, le pays était bien tenu par les frères d’armes. Episode incroyable dans les annales du pays des coups d’Etat que celui d’un jeune président entre la vie et la mort, à la tête de la caverne d’Ali Baba, soutenu par ses frères d’armes contre vents et marées.
Là on a eu la preuve qu’il se passait dans l’armée une véritable mutation. Elle devenait de plus en plus stable alors qu’en face le camp des civils devenait de plus en plus instable. Passons sur la balle, passons sur le printemps arabe, passons sur la façon dont le front islamiste a été littéralement dompté jusqu’à les faire participer aux élections législatives pour en faire les chefs de l’opposition de sorte à les recevoir hier à la présidence et voilà qu’ils en ressortent en disant que la rencontre fut franche et profonde…
http://fr.ami.mr/index.php?page=Depeche&id_depeche=29388
Aziz président de l’UA par défaut comme il renversa Sidioca par réflexe, Aziz assis à côté d’Obama comme co-organiteur du sommet. Voilà désormais Aziz chef incontesté d’une Mauritanie politiquement apaisée car il ne se passe plus rien sur la scène politique. Rien ! Sinon l’élan subversif de l’IRA même si on peut dire que c’est la liberté d’expression totale sous Aziz qui fit que l’IRA a pu créer le débat à l’intérieur de la Mauritanie.
Certains disent que Birame fait l’affaire d’Aziz car le front h’ratine ne fait que renforcer la communauté maure autour d’Aziz or c’est « la communauté » qui tient le pouvoir politique, économique et militaire surtout que désormais Birame attaque aussi les féodaux noirs ce qui brise le front black contre les maures. Tout cela est excellent pour Aziz même si les mauritaniens risquent d’en payer le prix fort dans quelques années car la fraternité h’ratines et maures est fissurée et bientôt brisée même si un front H naissant faisant du bruit ne peut que réduire à néant le front négro-mauritanien et renforcer le front féodal maure et noir au sommet de l’Etat. Tout cela annonce encore des temps tranquilles sans instabilité sérieuse.
Tout ça pour dire qu’à défaut d’avoir fait des choses qui le feraient entrer dans l’histoire du pays, Aziz a réussi à s’imposer, à faire fortune sans faire couler le sang, sans remplir les prisons et en laissant les gens parler comme ils veulent même si cette liberté d’expression faussement gratuite se paie cher pour les plus engagés. On a vu le cas du frère de Hanevi Ould Daha viré du port, on a vu le cas d’autres auxquels le pouvoir envoie leurs familles pour les tempérer sinon c’est la famille qui paiera. Voilà pourquoi très peu de gens osent s’exprimer.