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birameNous avons été placés en détention à la prison civile de Rosso sur ordre du juge d’instruction près le Tribunal de Rosso le samedi 15 novembre 2014 à 13 heures. Les cellules où nous avons échoué sont particulièrement exiguës. Elles étaient prêtes pour nous accueillir depuis plusieurs jours, ce qui laisse penser que la décision de nous envoyer en prison était prise depuis bien longtemps et qu’elle  a été transmise de très haut aux autorités judiciaires.

L’après-midi du jour même de notre incarcération, nous avons reçu la visite d’une délégation composée de deux personnes déclarant travailler pour le compte du bureau du Haut Conseil des Nations Unies pour les Droits de l’Homme à Nouakchott. Il y avait là une dame éthiopienne répondant au nom de Mehra et un monsieur, maure, qui se présenta comme étant avocat collaborant avec le bureau du Haut Commissariat. La délégation prétendait être venue à la demande du gouvernement mauritanien soi-disant pour se faire une idée des événements qui nous ont menés en prison. Lors de nos entretiens, nous leur avons  décrit en détail le traitement inhumain qui est le nôtre, fait de tortures morales et physiques et d’enfermement derrière de lourdes portes métalliques dans des cellules minuscules et pleines comme des œufs. Nous leur avons aussi décrit l’isolement du monde extérieur qu’on nous impose ainsi que l’état de santé dégradé de la plupart des prisonniers.

Mais quelle ne fut pas notre surprise quand nous avons découvert que le fameux « avocat » était muni d’un dictaphone avec lequel il a enregistré la totalité de notre conversation avant de tout transmettre aux Services de Renseignements mauritaniens qui en ont fait un grossier montage qu’ils ont pu distribuer aux organes de presse qui leur sont inféodés, à des fins évidentes de propagande et de désinformation.

Mais les Services de Renseignements ne s’en sont pas tenus à ce premier montage. Les jours suivants, ils nous ont envoyé une bande d’informateurs notoirement connus pour être des zélateurs du régime raciste de Nouakchott. Parmi ces limiers, nous citons : Mohamed M’BAREK, Lebatt MOHAMED, Ahmed vall BARKA, Izidbih, Sidi Abdallah, Chwey Bilal et d’autres imposteurs qui prétendent être des défenseurs des Droits de l’Homme venus nous saluer et nous soutenir. Nous avons, évidemment, refusé de recevoir cette génération spontanée de « défenseurs » des droits de l’homme et exigé des gardes de les renvoyer d’où ils venaient. Nous apprendrons, par la suite, que nos vaillants « humanitaires » avaient tenu une conférence de presse, dès leur retour bredouilles à Nouakchott, sous le haut patronage du Général Mohamed Ould Meguett, chef des Services de Renseignements et qu’ils s’étaient longuement appesantis sur nos « excellentes conditions de détention » avant de se répandre en louanges sur le régime mauritanien et faire reluire son exécrable image.

La réalité est que nous vivons un enfer dans cette prison civile de Rosso. Nous souffrons de toute sorte de mauvais traitements, de tortures morales et physiques dont la plus simple est la chaleur suffocante des cellules où nous sommes traités comme des délinquants de droit commun.

Depuis quelques temps, notre régime de surveillance est devenu des plus stricts, notamment depuis que nous avons été confiés à des jeunes soldats de la garde sans aucune expérience ni éducation. Pas moins de sept officiers (colonels) se sont succédé à la direction du poste de surveillance de la prison ; tous furent des Bidhane avec, sous leurs ordres, des subalternes tous Noirs. N’est-ce pas là une manifestation flagrante de pratiques ségrégationnistes et racistes ?

L’après-midi du mercredi 26 novembre 2014, le lieutenant, Sidi Mohamed Ould Taher, a mis un point d’honneur à nous faire regagner nos cellules par la force contrairement à ses prédécesseurs qui avaient toujours essayé de mettre des formes dans la manière de nous traiter. Le Lieutenant raciste s’était présenté avec huit autres soldats, tous Bidhane, et était sur le point de leur ordonner de s’en prendre au Président Biram Dah Abeid et à son adjoint, Brahim Ould Bilal ; seule l’intervention d’un vieux garde l’en dissuada. Il avouera plus tard qu’il avait reçu ces ordres-là de la part du Colonel Mohamedou, alias L’Arabisant, commandant de la garnison de la prison de Rosso.

Au nom de l’ensemble des détenus d’IRA, dirigeants, militants et sympathisants, nous adressons nos plus vifs remerciements à l’ensemble des composantes du peuple mauritanien pour leur soutien à notre cause et leur condamnation des privations de liberté, des tortures physiques et morales dont nous sommes victimes entre les murs des prisons de Rosso et de Nouakchott.

Nous remercions vivement les partis politiques de l’Opposition ainsi que les véritables organisations de défense des Droits de l’homme pour leurs déclarations et prises de position dénonçant la mascarade ourdie par les Services de Renseignements du régime actuel.

Nous saluons chaleureusement les positions des chancelleries du monde libre, des organisations et institutions internationales qui ont très vite condamné les violences faites aux dirigeants d’IRA.

Aussi, nous adressons un appel pressant aux Rapporteurs des Nations Unies sur la torture, le racisme, l’esclavage, les arrestations arbitraires et le droit à l’association et à l’expression pour qu’ils poursuivent le régime mauritanien pour avoir incarcéré sans motif valable 16 adhérents de notre organisation en violation délibérée de toutes les conventions et traités internationaux relatifs aux droits de l’homme.

Depuis la prison civile de Rosso          le 28 novembre 2014

Biram Dah Abeid

Brahim Bilal Ramdhane